Ce document est extrait d'une analyse stratégique réalisée dans le cadre du programme MBA de l'INSEAD au cours de l'été 1997.  Dans cette analyse, l'exemple d'IKEA, entreprise très innovante en terme de création de valeur, permet de tirer des enseignements précieux pour l'industrie automobile.

Robert McCann était l'un des membres de l'équipe qui réalisa cette étude.

 

 

 

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“Notre objectif est double : démontrer que des innovations en création de valeur peuvent intervenir dans divers domaines et discuter de la capacité de transfert de certaines de ces innovations vers d'autres industries. Dans ce cadre, nous examinerons trois innovations en terme de création de valeur – l'une de produit (Benetton), une autre en terme de service (Club Med) et la dernière dans le domaine de la distribution (IKEA).  Pour chacune de ces innovations nous discuterons de l'application possible de ces innovations et de leur potentiel de transfert vers d'autres secteurs. En somme, nous nous intéresserons principalement non aux innovations elles-même mais surtout au processus intellectuels et aux étapes logiques qui les sous-tendent.”

 


4. L'innovation de distribution

- Intégrer le client dans la chaîne de valeur

Si vous étiez Ingvar Kamprad en 1987 (date de l'entrée d'IKEA sur le marché britannique), dirigeant d'une entreprise nationale prospère vendant des biens à sa marque sur l'ensemble du territoire local (la Suède), comment feriez-vous pour mettre en place un réseau de distribution vous permettant de maximiser la valeur proposée aux clients tout en réduisant les coûts pour pénétrer dans un nouveau marché ? La solution d'Ingvar Kamprad créa un avantage substantiel par rapport aux normes traditionnelles en Grande-Bretagne. Le produit n'était pas fondamentalement différent et le système de gestion des ventes et des approvisionnements existait déjà chez le concurrent MFI, cependant Kamprad enfreignît les règles traditionnelles du secteur en cessant de considérer comme indispensable pour le distributeur de se déplacer jusqu'au pas de porte de son client. Il considéra au contraire que, si la valeur perçue était suffisante, le client se déplacerait lui-même jusque chez le vendeur.

 

Nous démontrerons que la stratégie d'Ingvar Kamprad dans le secteur de l'ameublement pourrait tout à fait être utilisée dans le secteur automobile par un nouvel entrant, ce qui secouerait violemment le cours tranquille de ce secteur.

4.1 Description du système de distribution

En Grande-Bretagne, en 1987, des vendeurs comme Habitat proposaient de l'ameublement de qualité par l'intermédiaire d'un réseau important de magasins de centre-ville dans les grandes villes.  La chaîne MFI, qui proposait des meubles bon marché, avait quant à elle des magasins légèrement excentrés dans la plupart des villes et agglomérations de tailles moyennes et grandes. MFI utilisait un système informatisé de gestion des achats et des stocks sophistiqué, qui permettait aux clients de se promener dans le magasin, de sélectionner les produits en relevant leur numéro de code sur une liste de course et de soumettre cette liste à un vendeur qui les saisissait via un ordinateur et imprimait la facture. Il ne leur restait plus qu'à récupérer à la sortie les articles achetés, présentés dans des cartons plats faciles à transporter en voiture (ce système est similaire à celui d' IKEA).

 

Quoique MFI soit toujours bénéficiaire en Grande-Bretagne, sa croissance et sa rentabilité sont loin derrière celles d'IKEA. La différence principale réside dans la taille des magasins et leur localisation. Les magasins IKEA sont énormes, des hangars de 20.000m2 situés en dehors de la ville, mais ils sont tous placés dans les régions les plus densément peuplées du Royaume-Uni.

 

La limitation du nombre de magasins à 7 dans l'ensemble du pays a permis à IKEA de simplifier radicalement sa logistique, la livraison finale au client étant généralement assurée par le client lui-même.

 

4.2 En quoi ce concept constitue-t-il une innovation en création de valeur ?

“L'innovation en création de valeur est l'atteinte simultanée d'une augmentation importante de la valeur perçue par le client et d'une réduction de coûts pour l'entreprise." IKEA a atteint ce but grâce à la rationalisation de son réseau de distribution, réduit à un minimum vital, ce qui a permis à sa large gamme de produits de qualité d'atteindre une base de clients aussi vaste que possible économiquement. Dans le même temps, les coûts associés à la gestion dans les centre-villes (immobilier, ressources humaines, fiscalité, contraintes logistiques, etc.) étaient drastiquement réduits.

Courbe de valeur : comment IKEA devance MFI et Habitat en proposant qualité et variété à moindre coût.


 

Comme le montre la courbe de valeur, MFI avait modifié le modèle traditionnel du magasin d'ameublement en proposant des meubles en cartons plats.  IKEA fit encore évoluer ce profil en proposant une plus grande variété, une meilleure qualité et en concentrant son offre sur un nombre très limité de magasins immenses. En choisissant d'être placé à la périphérie des principaux centres urbains, IKEA se donnait les moyens de maintenir des prix bas, attirant ainsi une clientèle de masse et innovant vis-à-vis du dilemme "Porterien" traditionnel entre coût et qualité (voir diagramme ci-contre).

La stratégie d'IKEA était pro-active. Il ne s'agissait pas de battre la concurrence à son propre jeu mais plutôt d'attirer la plus large base possible de clientèle en fournissant le service le plus complet possible dans le secteur de l'ameublement et de la décoration.

 

En tant que nouvel entrant sur le marché britannique, IKEA n'était pas limité par des actifs existants ou une réputation antérieure. Nulles réorganisation, évolution stratégique ou modification d'image n'étaient nécessaires. En outre, IKEA pouvait s'appuyer sur le succès considérable de son concept global en tant que distributeur de meubles en Europe du Nord et ailleurs, ce qui lui donnait une expérience formidable du marché de masse.

 

L'"expérience d'achat" IKEA ne se limite pas aux meubles, mais elle englobe une large gamme d'éléments de décoration, d'équipements de la maison, de jouets, d'articles de jardin, d'accessoires de bricolage, etc. Le client peut ainsi satisfaire de multiples besoins dans un endroit unique. Les magasins IKEA proposent un restaurant/cafétéria, des services et équipements destinés aux enfants ; et un personnel nombreux est disponible pour assister l'acheteur à tout moment. Cet ensemble a permis à IKEA de créer une norme de service que l'on peut qualifier d'unique, largement supérieure à celle offertes par ses concurrents.

 

4.3 Capacité d'application à l'industrie automobile

Comment ce bond en terme de création de valeur réalisé par IKEA pourrait-il s'appliquer à un autre secteur de biens durables tel que l'automobile, actuellement limitée par une forte reconnaissance des marques, des structures complexes, ainsi que des contraintes de service après-vente. Quelle est la stratégie à adopter par un nouvel entrant souhaitant se développer hors de son marché domestique et pénétrer le marché britannique ou tout autre marché européen ? Cet exemple pourrait s'appliquer à des sociétés comme Chrysler, Daewoo, Proton ou Hyundai, qui pourraient désirer installer en Europe des infrastructures de production et de vente. 

 

4.3.1 Concurrence

Les 17 marchés d'Europe regroupent 56.000 revendeurs ainsi que 43.000 distributeurs secondaires proposant des voitures neuves, ce qui représente environ 1,5 millions de personnes (source : KPMG).  En Grande-Bretagne, on compte 6.200 revendeurs principaux et 1.100 vendeurs secondaires.

Alléger la structure de distribution permettrait des gains extrêmement importants. Les autorités politiques travaillent actuellement sur une remise en cause de la structure actuelle de vente via des franchisés et il est probable que ceci ouvre de nouvelles opportunités pour de grands distributeurs multi-marques trans-européens, se rapprochant ainsi du modèle états-unien.

 

Les fabricants d'automobiles ont énormément réduit les délais de livraison, qui peuvent être inférieur à 10 jours entre la prise de commande et la livraison du véhicule :

Commande

Planification

Optimisation

 

 

 

 

 

 

 

du plan

Ordonnance-

 

 

 

 

 

 

 

ment

Entrée ligne

 

 

 

 

 

 

 

 

Assemblage

Sortie ligne

Réception

 

 

 

 

 

 

 

revendeur

 

 

 

 

 

 

 

 

¬        délai de livraison <10 jours entre commande et réception        ®

 

Cependant, les véhicules passent généralement 60 à 70 jours dans les espaces de présentation des revendeurs ou sur des parkings. Le surstock de produits finis représente environ 15 Mds € en Europe. En outre, selon le professeur Dan Jones (Cardiff Business School, président européen du Programme International des Véhicules à Moteur) :

"le revendeur n'est souvent que peu ou pas intéressé par ce que le client désire, mais avant tout par la vente des véhicules qu'il a en stock. Pire encore : les prévisions fondées sur ce que le client a été convaincu d'acheter – que bien souvent il ne désirait pas – a conduit à des erreurs importantes de prévision et donc à des rabais futurs."

 

Plutôt que de se comparer à la concurrence (ce qui conduirait par exemple à des réactions telles qu'une réduction progressive des stocks de 60 à 50 jours), un nouvel entrant pourrait adopter une démarche pro-active, ne laissant pas d'autre alternative à ses concurrents qu'une réaction a posteriori.  L'objectif n'est pas de battre la concurrence sur son propre terrain mais plutôt de restructurer complètement la proposition de valeur en éliminant les éléments de coût n'offrant que peu d'avantages au client et en améliorant le niveau minimum des prestations.

 

4.3.2 Clients

Cette entreprise devrait s'attacher à satisfaire un marché de masse en se focalisant sur les points communs à l'ensemble des clients en terme de valeur, plutôt que de se plier à des exercices de segmentation destinés à fidéliser l'ensemble des catégories de clients. Elle pourrait donc décider de ne pas se préoccuper de certaines personnes situées dans des endroits peu accessibles, afin de proposer ses services à 90% de la population vivant en zone urbaine. Pour les clients demeurant dans ces zones de chalandise, l'amélioration perçue en terme de valeur peut alors être assurée en maintenant une très bonne qualité de produits et un choix important à prix bas.

 

4.3.3 Structure et actifs

Examiner ce marché du point de vue d'un nouvel entrant permet de ne pas être limité par des structures pré existantes. Un cadre de la division commerciale de Renault, à qui les idées de ce document avaient été présentées, répondit en démontrant l'attachement de la société à sa structure actuelle :

"étant donné qu'une voiture sur trois est une Renault, un garagiste est assuré d'avoir un flux illimité de clients en après-vente s'il choisit de porter les couleurs de Renault.  Ses clients hésitent à apporter leur voiture à un non franchisé, craignant que la réparation soit moins professionnelle. L'omniprésence de ces revendeurs constitue une motivation supplémentaire pour le client qui se demande où il va faire entretenir et réparer sa voiture une fois qu'il l'aura achetée'.

C'est pour cette raison que notre stratégie actuelle repose sur le soutien du petit revendeur."

 

L'attachement de Renault à son réseau de près de 7.000 agents et revendeurs en France s'appuie sur le préalable que les acheteurs de voitures sont préoccupés par l'entretien et les réparations.  Les Japonais n'avaient-ils pas réduit cette dépendance en vendant des voitures qui étaient (ou semblaient) avant tout fiables ?

 

Nous pensons que la proposition de valeur souhaitée par le client est d'avoir une voiture fiable et de qualité à un prix bas, facile à faire entretenir et à réparer.  Les tendances européennes indiquent que les clients évoluent et reconnaissent qu'un service de qualité peut être réalisé à des tarifs compétitifs dans l'un des nombreux réseaux franchisés tels que Speedy, Midas, Halfords (GB) ou Carrefour (en France).  La plupart des constructeurs vendent désormais des voitures fiables et de qualité, mais ceux qui resteront attachés à leur réseau dense de commercialisation ne pourront atteindre l'objectif nécessaire de réduction des coûts, ce qui les conduira à perdre des parts de marché.

 

4.3.4 Produit/offre de service

Un nouvel entrant n'est pas restreint par des limites traditionnelles. Il peut ainsi étendre sa réflexion à une offre globale au client et dépasser le périmètre habituel du secteur. De la même manière qu'IKEA a intégré le client dans sa chaîne de valeur et amélioré son offre avec un catalogue de vente par correspondance et d'énormes entrepôts de vente "tout est présenté – tout est en stock", nous présentons la proposition de valeur suivante pour un nouvel entrant sur le marché automobile européen :

 

4.3.4.1 Ventes

Le nouvel entrant pourrait mettre en place un réseau de distribution inspiré du modèle IKEA, installant des grandes surfaces de vente dans des zones fortement peuplées.  Tous les principaux modèles seraient présentés, tous seraient en stock. Les modalités d'achat et les possibilités de financement devraient être aussi simple que pour louer une voiture chez Hertz ou Avis.  Des vendeurs et des écrans d'ordinateurs interactifs (qui permettraient des achats via des cartes de crédit à la manière de ceux d'Accor) seraient largement disponibles, permettant au client de choisir sa voiture et de partir au volant de celle-ci en moins de 15 minutes.

 

L'absence d'infrastructures permettant de tester les véhicules serait contre-balancée par la possibilité de retour avec remboursement dans les deux semaines suivant l'achat, ce qu'offre déjà Rover en Grande-Bretagne.  Le prix des véhicules d'occasion serait simplement fixé par un catalogue du type Argus, suivant le type de voiture, son âge et son kilométrage.  Le prix d'échange serait initialement calculé à partir du prix neuf.  Des divertissements pour les enfants, des vidéos de voiture, des tombolas (avec des prix tels qu'une voiture ou un plein d'essence) et une cafétéria du style de celles d'IKEA pourrait également être proposés.  Pour les clients ne désirant pas partir au volant de leur voiture nouvellement acquise, un service de livraison à domicile serait proposé à un prix forfaitaire au niveau national.

 

Deux moyens permettraient de servir les clients ne pouvant se déplacer jusqu'à ces nouveaux magasins :

1.    Des équipes de vente itinérantes sillonneraient le pays, installant des stands sur des parkings de centre commerciaux ou dans le cadre d'événements sportifs (courses de voiture, salons automobiles). Les mêmes systèmes de rachat de véhicule d'occasion, de financement simplifié et de livraison à domicile serait proposé.

2.    Le constructeur nouvel entrant établirait un système de vente par correspondance, permettant aux prospects de faire leur commande par téléphone ou via Internet en s'appuyant sur des catalogues papier ou des sites de présentation. Les voitures seraient livrées à domicile et les véhicules d'occasion seraient échangés selon le même principe de "prix catalogue".

 

Les clients entrés en contact par téléphone, visites ou achats seraient intégrés dans une base de données et recevraient des informations chaque année sur les nouveaux modèles et les promotions.

 

4.3.4.2 Après-vente

Le service après-vente est essentiel dans le secteur automobile.  Notre nouvel entrant devrait s'assurer d'être capable de proposer la meilleure offre après-vente possible en fournissant les trois services suivants :

1.    Partenariat avec des réseaux d'assistance automobile (comme Europ Assistance, AA, RAC, Green Flag...) afin d'assurer une prise en charge rapide en cas de panne durant un déplacement.

2.    Licence à une ou plusieurs des chaînes de réparation automobile (Midas, Halfords, Carrefour ...) afin d'assurer une garantie locale et un service de réparations.

3.    Amélioration importante du service au consommateur grâce à une garantie 3 ans (pour les problèmes mécaniques) ainsi que la mise à disposition d'un véhicule de courtoisie dans le cas d'une avarie grave. Ceci pourrait être organisé par l'intermédiaire d'un accord avec un loueur de voitures ou par le prêt de véhicules.  Si le constructeur est à l'origine des problèmes mécaniques, un modèle "remplacement par du neuf" pourrait être adopté, afin de fidéliser le client et de donner un feed-back qualitatif au constructeur.

 

4.3.5 Redéfinition de la valeur

La stratégie présentée ci-dessus est résumée simplement par une analyse de la courbe de valeur :

1.    Facteurs de création de valeur considérés comme indispensables par le secteur mais de peu d'intérêt réel pour le client :

-          Halls d'exposition de centre-ville, avec des équipes et des stocks ;

-          Garages de réparation et de révision mono-marques.

 

2.      Facteurs de création de valeur dont les normes pourraient être réduites en dessous des pratiques actuelles :

-          Infrastructures de test ;

-          Evaluations de véhicules d'occasion ;

-          Promotions et possibilité de négociations.

 

3.      Facteurs de création de valeur qui devraient être élevés au-dessus des normes actuelles du secteur :

-          Sélection de véhicules disponibles sur place ;

-          Equipements (restaurant, prise en charge des enfants) ;

-          Période de garantie ;

-          Politique d'échange et de prêt de véhicule.

 

4.      Facteurs de création de valeur jamais offerts dans ce secteur à proposer désormais :

-          Au moins 20% d'économies pour des produits de qualité équivalente voire supérieure grâce à des frais réduits de distribution et à la réduction des marges des concessionnaires (3 000 € par voiture) ;

-          Achat à domicile par téléphone ou Internet, avec possibilité de livraison ;

-          Achat en 15 minutes sans contraintes, incluant l'achat par carte de crédit, l'immatriculation du véhicule et son assurance.

Courbe de valeur


 


 

4.4 Conclusion, Lignes directrices pour les meilleurs acteurs du secteur. Evolution.

La description précédente peut être représentée de manière graphique dans le schéma d'innovation de valeur ci-dessous :

Pour des raisons structurelles, notamment le capital humain et financier considérable représenté par les réseaux de vente et de distribution existants, la stratégie proposée est intéressante pour des nouveaux entrants potentiels mais paraît difficile à mettre en œuvre pour des acteurs déjà en place.

Ceux-ci doivent trouver les moyens de réduire la dépendance des réseaux vis à vis des constructeurs, afin de rapprocher le prix d'achat d'un véhicule de son coût de fabrication. Ceci conduirait les revendeurs à suivre les tendances suivantes :

1.    Consolidation parmi les distributeurs (la France commençant à suivre le modèle britannique)

2.    Nouvelles sources de revenus, comme par exemple :

-          Transformation de centre d'exposition de centre-ville en parkings (ex. : Renault Marseille) ;

-          Achat de franchise de location de voiture et proposition de tests aux clients, plutôt que d'exposer uniquement les voitures.

3.    L'évolution de la législation européenne conduit certains vendeurs à proposer des véhicules et des services sous plusieurs marques, conduisant à une concurrence plus forte dans les activités d'après-vente par une amélioration des délais et une réduction des coûts (ex. : 'Renault Minute').

 

Inévitablement – et ironiquement – l'automobile, raison même de l'existence des revendeurs, par la mobilité qu'elle permet sera l'arme qui conduira à l'élimination de ces distributeurs puisque les clients ne seront plus condamnés à acheter au magasin le plus proche.

 

©  COPYRIGHT 1997

 

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